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jeudi 23 mai 2013

Epilogue - Abaco et dernière traversée vers la Floride: 21 avril - 14 mai

Pendant trois ou quatre jours, le paysage déjà morne de Marsh Harbour est obscurci par la pluie et nous attendons que cela passe, profitant entre deux averses de la petite piscine d'une marina voisine. Mercredi 24 avril, le temps est redevenu beau, le vent favorable et nous partons, enfin, pour une petite navigation jusque Great Guana Cay, où nous faisons la rencontre d'une famille américaine vivant à bord de son catamaran TAKE TWO: dans ce grand appartement flottant, le quotidien des cinq (!) enfants est orchestré avec une redoutable efficacité par Tanya, la maman, dont le sourire constant est une inspiration pour moi... Nous passons ensemble de très bons moments avant que, très vite, nos routes ne se séparent et que, une fois encore, les enfants nous demandent pourquoi on doit toujours quitter les copains que l'on vient de se faire...

Entre Great Guana Cay et Great Sale Cay, qui sera notre point de départ pour la traversée vers la Floride, il y a environ 70 milles que nous parcourons en deux semaines, soit à un rythme très lent! Ce que nous en retiendrons surtout, c'est notre halte prolongée devant le minuscule village de New Plymouth sur Green Turtle Cay. Pour la petite histoire, New Plymouth a été fondé par une communauté de loyalistes, c'est-à-dire des colons américains qui, au moment de la guerre d'indépendance des Etats-Unis, ont choisi de rester fidèles à la monarchie britannique - d'où son nom, je suppose. C'est ainsi que dans le périmètre du "Heritage Festival" annuel, auquel par chance nous avons pu assister, on voit se promener entre les stands d'artisanat local ou de salades de lambi des dames en costume du XVIIIème siècle... Ces deux jours de fête et de musique auxquels viennent participer les habitants de toutes les cayes environnantes culminent avec le junkanoo, parade d'enfants déguisés de costumes fabriqués avec une minutie et une imagination époustouflantes tout au long de l'année scolaire. Un régal pour les yeux et une grande inspiration pour Luca et Vadim...

Après Green Turtle Cay, c'est vraiment... le début de la fin: derniers mouillages sauvages, dernière classe, derniers bains de mer. Vendredi 10 mai, parce qu'il semble que la météo prévoie un répit et que nous pourrons passer entre les orages qui tournent depuis quelques jours, nous levons l'ancre (ça aussi, pour la dernière fois...) à Great Sale Cay et entamons l'ultime traversée de notre aventure en famille: au lever du soleil le lendemain, nous approchons des côtes de Floride la gorge serrée.

Le retour à terre se fait rapidement, et brusquement, autour de la marina de Cap Canaveral où les enfants et moi descendrons du bateau pour prendre un avion vers Bruxelles: trois jours de vidage, rangements, valises... et même une expédition dans un shopping mall à Orlando, à cent mille lieues de la pêche aux oursins à Green Turtle Cay! Le jour-même de notre départ, ce 14 mai, le fidèle François arrive et embarque sur Panta Rhei pour accompagner Marc dans la remontée jusque Washington où le bateau séjournera un moment, en attendant que l'avenir se dessine.



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Difficile de se représenter que nous allons quitter Panta Rhei, notre maison, et tourner la page sur cet extraordinaire moment de vie. Environ vingt-cinq pays visités et près de trente mille kilomètres parcourus. Deux ans de découvertes, de surprises, d'aventures en tous genres, bonnes et moins bonnes, au terme desquelles nous sommes tous les quatre heureux et fiers de pouvoir puiser à l'infini dans ce trésor d'expériences qui nous appartient pour toujours. Les enfants nous ont impressionnés, émerveillés, étonnés et Marc et moi regardons vers l'avant avec confiance. Même si l'avenir est encore incertain (mais en est-il jamais autrement?), d'une façon ou d'une autre l'aventure continue...

Je trace ici les dernières lignes de ce blog qui aura été pendant tout le voyage mon espace personnel et une immense source de plaisir - et je termine en exprimant ma gratitude.


Merci à celles et ceux que nous avons rencontré(e)s sur l'eau et avec qui nous avons partagé des moments parfois trop brefs mais toujours mémorables. Ils sont intimement liés à nos souvenirs sur Panta Rhei. Dans le désordre: Anne-Laure, Antoine et Arthur sur CATANELO; Perrine, Jean-Michel, Martin, Caroline et Rémi sur PINGOUIN; Tea, Mirko et Aurélien sur ORTEMI; Jeremy sur MANAO; Dale sur TARA; Olivier et Anne-Laure sur COCO; Chantal, Michaël et Arthur sur CAJOU; Géraldine, Greg, Louise et Marco sur LOUISA ONE; Carine, Fred, Tom et Louna sur PETIT PIMENT; Marion et Seb sur BACK OF THE MOON; Anne-Gaëlle, Matthieu, Rapahaël et Adrien sur TAOZ; Isa, Jean-Philippe et Lou sur GADJO DILLO; Daniel et Marta sur THALIA; Patricia, Manu, Fanny et Lisa sur KUANIDUP; Marco, Manuel et Laura sur SANDOKAN; Eric, Alice, Coline et Eden sur SURICAT; Julie, Fred, Charlotte, Paco et Manao sur ZUELA; Catherine, Yannick, Gabrielle, Myriam, Véronique et Eve sur LHASA; Jim sur CARISMA; Tanya, Jay, Eli, Aaron, Sarah, Sam et Rachel sur TAKE TWO; Robin, Jim et Daniel sur LAMMEROO.

Merci à celles et ceux qui nous ont accueillis en chemin et nous ont, avec une générosité qui nous a touchés droit au coeur, offert d'inoubliables "haltes terrestres" - par ordre chronologique: les familles d'Aoust, de Liedekerke, Tuinman, Scheyven, Diercxsens et de Meeûs en Corse; Scott, Olivia, Cassandra et Zelda à Majorque; Kate à New York; Lizz, Arnoud, Félix et Adrien à Newport; Jérôme et Luis à Provincetown; Penny, Drew et Adrian à Washington.

Merci à celles et ceux qui ont voyagé, parfois loin (et, pour certains, plusieurs fois!) pour venir voir de leur yeux et partager avec nous l'expérience de la vie à bord (c'est-à-dire le soleil et la mer... mais aussi le pompage des toilettes et le rationnement de l'eau): à chaque fois, des moments exquis et des souvenirs impérissables. Par ordre chronologique, encore: Tina, Cédric, Manu et Austin; Nadia; Papa et Maman; Amélie; Ian; François et Sylvia; Sophie, Laurent, Noémie et Gaspard; Ariane, Felix et Max; Laurent, Amélie, Louise et Gabrielle; Luc; Alicia, Olivier, Félix et Cassandre;  Emma et Juliette.

Merci aux équipiers occasionnels qui, de Gran Canaria à la Martinique (en passant par le Cap Vert) et/ou de Saint Martin à New York, ont accompagné Marc pendant les deux longues traversées que nous n'avons pas faites en famille. Ils ont été des compagnons de route efficaces, intrépides et enthousiastes:  Patrick, Jérôme, Frank et François, you're part of the Panta Rhei crew!

Merci à vous tou(te)s qui, physiquement et/ou en pensées, avez été présent(e)s tout au long de notre périple.

Et puis, au-delà de l'exprimable, MERCI à mes deux merveilleux enfants et à mon capitaine dont les talents sont infinis et qui, décidément, m'en fait vivre de toutes les couleurs... I love you.


Finalement, pour les amoureux du large, voici trois courtes videos filmées par Marc durant son dernier galop océanique vers Washington DC...









samedi 4 mai 2013

Bahamas, Nassau & Abacos: 13-20 avril

Vendredi 12, dernière soirée passée avec Laurent, Emma et Juliette... On se sent bien loin du palmier solitaire sur l'îlot robinson-esque de Norman's Cay, quitté pourtant le matin-même. Nous sommes à Nassau, que l'on a vue poindre de loin "grâce à" la silhouette éléphantesque du club de vacances Atlantis sur Paradise Island, extravagance délirante et kitschissime (6000 employés, 2500 chambres d'hôtel, un casino grand comme une ville, et même un temple Maya planté au milieu de l'une des onze piscines - aïe), et pourtant si rentable que le concept a été décliné en version -encore plus- scintillante à Dubaï...

Mais sur Paradise Island il y a aussi, loin des clochetons de l'Atlantis, un hôtel caché dans un bout de palmeraie où l'on a dîné délicieusement et très gaiement -merci Laurent!- entre mer immense et jardin manucuré. C'était carrément "une fois autre chose", et nous en avons profité grandement!

Le lendemain matin, à peine remis des au-revoirs (avec, cette fois-ci, une production lacrymale limitée car les prochaines retrouvailles sont pour bientôt), nous sommes en train d'astiquer le bateau quand nous voyons Amélie arriver derrière son grand sourire en trottinant sur le quai. Tellement bon, tellement bon de se voir! Cela faisait-il vraiment tout un an? Par quel enchantement, depuis aussi loin que l'on s'en rappelle (35 ans, c'est aussi vieux que nos mémoires...), avons-nous toujours la sensation de connecter instantanément, même après de longues périodes de séparation? Peu importe - c'est un trésor.

Ce deuxième séjour pour Amélie sur Panta Rhei, après les Baléares à la fin de l'été 2011, clôture en beauté le chapitre "visites à bord" de notre aventure nautique. Etrange sensation; c'est la série des "dernières fois" qui commence...

Très vite, nous quittons Nassau (et l'île de New Providence) pour aller mouiller l'ancre devant Rose Island, à une heure au nord-est de là. Retour en eaux transparentes en bordure d'une grande plage déserte. That's more like it... A partir d'ici, pour continuer à progresser vers le nord, il faut effectuer une traversée de 80 milles environ jusque Great Abaco Island avant de zigzaguer en sauts de puce le long de l'archipel des Abacos entre les bancs de sable.

Nous décidons de faire cette traversée de nuit et levons l'ancre dès le samedi 13, à la tombée du jour, en direction de Great Abaco. A peine quelques milles après avoir contourné Rose Island, le profondimètre se met à crier: 2,2 mètres au compteur, soit la profondeur de la quille... Il s'agit d'une patate de corail non répertoriée sur les cartes, et il s'en faut de peu pour qu'on talonne le récif. Une fois l'émotion passée, nous poursuivons notre route d'abord très tranquillement (tandis que l'Atlantis, tel un bubon géant, se découpe encore à l'horizon derrière nous pendant une bonne vingtaine de milles...), puis un peu moins confortablement dans une houle légère mais suffisante pour faire rouler Panta Rhei; les enfants mis à part, l'équipage n'aura pas beaucoup dormi mais l'allure est bonne tout le long, aussi quand nous approchons Little Harbour sur la côte est de Great Abaco il fait encore nuit. Prudence oblige à l'abord des côtes truffées de récifs, nous faisons quelques ronds dans l'eau en attendant le lever du jour pour aller mouiller l'ancre juste à l'extérieur de la baie.

L'histoire de Little Harbour est celle d'une "rêve bahaméen": au début des années 1950, le sculpteur Randolph Johnston a quitté son poste de professeur d'université dans le Massachusetts pour emmener sa femme et leurs quatre enfants vivre à bord de leur bateau, sans destination particulière. Arrivés à Little Harbour, alors totalement désert, ils furent séduits par le calme, la plage et les eaux claires, et décidèrent de s'y installer. En attendant de s'y construire une maison, ils vécurent dans une grotte, puis une hutte, et petit à petit les choses prirent forme: en peu de temps, ils avaient construit une fonderie et le père occupait ses journées à sculpter ce que lui inspiraient les paysages alentours. Il est mort à plus de 80 ans, après avoir passé près de la moitié de la vie dans son coin de paradis... Little Harbour s'est quelque peu développée depuis, mais aujourd'hui encore elle est habitée principalement par les enfants et petits-enfants du sculpteur, et le Pete's Pub and Gallery (ouvert par l'un de ses trois fils) constitue le seul commerce à l'horizon...

Pendant quelques jours nous traînons dans les cayes qui sont situées au large de la côte est de Great Abaco et la protègent donc de la houle atlantique: les mouillages y sont parfaitement calmes et assez peu fréquentés (c'est déjà la fin de la saison, paraît-il).

A Lynyard Cay, nous avons le plaisir de recroiser Chantal et Michaël sur CAJOU (leur petit Arthur est déjà rentré en Belgique) que nous avions brièvement mais intensivement rencontrés à Cap Canaveral au mois de novembre dernier. Ils arrivent tout droit du Mexique et sont en route vers les Bermudes - et à l'heure où j'écris ceci ils sont sans doute en train d'approcher des Açores! La soirée passée avec eux est très joyeuse et se termine par un tête-à-tête mémorable entre Amélie et moi, avec une nage nocturne autour du bateau - en dépit du fait que, "comme chacun sait" (...), les requins chassent la nuit et il est strictement déconseillé de se risquer dans l'eau entre le coucher et le lever du soleil - ce que nous avons curieusement, mais totalement, oblitéré de nos esprits à ce moment-là et nous sommes fait rappeler avec moulte gros yeux et sourcils froncés par Marc et Chantal le lendemain...

A Pelican Cay, nous nous arrêtons le temps d'aller plonger en masques et tubas sur un bout de récif; raies léopard, tortues, barracudas géants, quadrillages de corails immenses et finement sculptés - sans doute parmi ce ce que nous aurons vu de plus beau en plongée pendant le voyage.

A Elbow Cay, nous tombons sous le charme de Hope Town, charmant village coloré et photogénique dont le phare rouge et blanc, datant de 1862, est l'un des trois derniers phares au kérosène actionné à la main au monde - et en fait un décor de carte postale qui attire beaucoup de monde. La plage est sublime, immense, et les dunes sont un irrésistible appel aux rollekebols (désolée pour les non-Belges...).

Dernière étape pour Amélie, qui y reprendra un avion pour Nassau avant de s'envoler vers Bruxelles: Marsh Harbour, dont nous serons assez déçus. A part un supermarché à l'américaine, et une petite piscine dans l'une des marinas qui fait la joie des enfants, l'endroit n'a aucun intérêt particulier. Et en plus, il se met à pleuvoir dru.

Merci Amélie pour ton séjour avec nous, encore un merveilleux bout de vie ensemble dans notre longue histoire commune...

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jeudi 25 avril 2013

Bahamas, Exumas: 1-12 avril

En fredonnant en boucle, et le sourire aux lèvres, le refrain redoutablement efficace entendu pendant la messe de Pâques ("I command my soul to bless the Lord, I command my sou-ou-oul to bless the Lord..."), nous quittons Little Farmers Cay pour Black Point - à une dizaine de petits milles vers le nord. Ici encore, nous sommes surpris par l'aspect très modeste et peu développé de l'endroit, qui se targue pourtant d'être le deuxième settlement des Exumas en taille après Georgetown.

Au fond, les Bahamas sont -jusqu'ici en tous cas- une excellente suprise. Contrairement aux mises en garde et avis mitigés recueillis auprès d'autres bateaux passés dans la région plus tôt dans la saison, nous sommes séduits par la beauté sauvage des mouillages aux eaux transparentes, le confort des petites navigations à l'intérieur de cet immense récif -dans lequel Panta Rhei se fraye sans trop de difficultés un chemin à la mesure de sa profonde quille-, l'authenticité des petits villages visités et la présence de quelques infrastructures (avitaillement, lessive - c'est peut-être un détail pour vous, mais pour moi...) parfaitement adaptées aux plaisanciers sans toutefois dénaturer le paysage. Et puis, les couples de retraités américains, même s'ils sont nombreux, ne sont pas des voisins de mouillage très encombrants...

A Black Point, nous nous attardons un peu pour ne pas rater le passage hebdomadaire (en principe...) du mailboat qui approvisionne la dizaine de magasins d'alimentation des Exumas. Lorsque nous voyons un catamaran jeter l'ancre non loin de nous, avec un pavillon français (cela faisait longtemps!) et des filières équipées de filets indiquant la présence d'enfants à bord (ça aussi!), nous avons tôt fait de sauter dans le dinghy et d'aller les saluer. En un rien de temps, ils nous racontent leur histoire et nous la nôtre, et la connection est immédiate; Alice et Eric ont tout récemment quitté Tahiti, où ils vivaient depuis 15 ans, pour entamer un long voyage sur SURICAT avec leurs deux filles, Coline et Eden (5 et 3 ans, soit à peu près exactement l'âge qu'avaient Luca et Vadim quand nous sommes partis...). Par leur intermédiaire, nous rencontrons Jim, un charmant navigateur solitaire sur son magnifique CARISMA ainsi qu'une irrésistible famille québecoise (Catherine et Yannick et leurs quatre (!) filles âgées de 2 à 6 ans (!!), Gabrielle, Myriam, Veronique et Eve), elle aussi fraîchement partie pour une aventure à durée indeterminée sur son voilier LHASA. Aaaah, la vision inoubliable de quatre tutus roses sautillant sur le pont de Panta Rhei... et de la tête mi-charmée, mi-affolée des garçons!

Jeudi 4 avril, après deux jours passés en compagnie de nos "nouveaux copains" (c'est comme ça les rencontres en bateau, souvent court mais intense...), nous devons nous quitter car nous continuons notre progression vers le nord tandis qu'ils descendent vers les Turks et Caicos. Nous mettons le cap sur Staniel Cay où nous serons à poste pour l'arrivée, quelques jours plus tard, de mon frère Laurent et de ses deux filles aînées, mes chères grandes nièces, Emma et Juliette.

Lundi 8, youpiiiee!!! Un an que nous ne nous étions plus vus... Quelle joie de les revoir et de les serrer dans nos bras - et quelle émotion de voir les filles si grandes et belles! Nous les cueillons à leur descente d'avion dans le minuscule aérodrome de Staniel Cay et les emmenons presque immédiatement nager dans l'impressionante Thunderball Grotto à côté de laquelle Panta Rhei est à l'ancre, avant d'aller observer une colonie de requins nourrices "habitant" sous les pontons de la marina: ils seront à bord pendant cinq petits jours, il s'agit d'en profiter...

Aussi, suivant un itinéraire soigneusement élaboré par Marc, nous verrons avec eux quelques-uns des endroits les plus beaux et/ou les plus étonnants des Exumas: les cochons nageurs de Big Major's Cay, la réserve naturelle de Warderick Wells (où, selon la tradition locale, nous déposons au sommet de BooBoo Hill une planche de bois marquée du nom du bateau et de son équipage, en souvenir de notre passage), ou encore l'iréelle beauté tropicale de Norman's Cay.

Vendredi 12, c'est déjà leur dernier jour... et c'est aussi l'anniversaire de Laurent, que nous fêtons modestement, mais très joyeusement, avec les moyens du bord. Une fois les bougies soufflées, nous nous mettons en route pour parcourir les 40 milles qui séparent Norman's Cay de Nassau, d'où ils partiront le lendemain matin.

Ce fut si bref - mais si bon! Enthousiastes et heureux de tout, aidants et curieux, et formidablement à leur aise dans le confort relatif du bord, leur visite nous a tous les quatre ravis. Nous avons adoré pouvoir partager avec eux un peu de notre quotidien sur Panta Rhei... Les quatre cousins ont cousiné intensivement, et nous avons tous savouré ce précieux petit morceau de vie ensemble...


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dimanche 31 mars 2013

Bahamas: Long Island (13 - 17 mars) et Exumas (14 - 31 mars)

En un peu moins de 24 heures, nous parcourons 150 milles nautiques depuis Puerto Vita, Cuba, à une allure de près serré raisonnablement confortable, sans autre incident que les pannes répétées du pilote automatique - le problème semble purement électronique et il accepte de se remettre en route quand on lui parle gentiment, mais il faudra regarder ça de près à notre arrivée dans les Bahamas...

Mercredi 13 mars, 8h30, nous sommes à quai dans la minuscule Flying Fish Marina de Clarence Town sur Long Island. L'endroit est modeste, les installation rudimentaires, mais après six semaines à Cuba la présence d'une connection wifi à bord est totalement réjouissante et le cheeseburger - coca du restaurant  particulièrement savoureux...

Après la quantité déraisonnable de milles nautiques avalés ce dernier mois (près de 900 d'après un rapide calcul mental), nous savourons pleinement un repos salvateur. Le temps est sombre et menaçant, mais nous entreprenons néanmoins de louer une voiture pour explorer l'île. Long Island - la bien nommée - est longue de 130 kilomètres et large de 6 kilomètres. Une seule route la traverse, du nord au sud (ou est-ce du sud au nord?), à peu près déserte à l'exception de quelques groupements de maisons encore appellés settlements en référence aux premiers colons Américains installés là à la fin du XVIIIème siècle. Le paysage est assez monotone et hormis l'excitation éprouvée en entrant dans un supermarché aux étagères fournies (cela faisait longtemps), la visite de l'île est assez décevante. Un site, cependant, nous a marqués pour longtemps: Dean's Blue Hole, le "trou bleu" le plus profond du monde (202 mètres) et régulièrement le théâtre de records de plongée en apnée. Après les cénotes des Mayas, encore un exemple de prodigieux effondrement sous-marin...

Deuxième et dernier arrêt sur Long Island, Calabash Bay à la plage et aux eaux sublimes, une invitation irrésistible à regonfler le kayak!

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Lundi 18, nous nous mettons en route pour Georgetown, sur l'île de Great Exuma. 25 milles seulement, et un gros thon blanc attrapé par un hameçon décidément très efficace! A partir d'ici, le reste des Exumas, minuscules pointillés sur les cartes, s'étend vers le nord ouest; Georgetown, lieu de rendez-vous classique pour "liveaboards" Américains venus passer l'hiver dans la douceur tropicale, est la 'ville' principale de l'archipel. Malgré cette réputation, nous trouvons le nombre de bateaux à l'ancre dans la baie assez raisonnable et l'endroit quasi trop calme! Pas que nous soyons affamés d'animation et de bruit, mais nous nous étions préparés à un folklore que l'on est presque déçus de ne pas trouver... Nous finissons par découvrir, juste en face de Georgetown, la plage de "Chat 'n Chill", agréable point de rencontre des plaisanciers échoués là pour toute la saison (peu de familles, surtout des retraités jeunes et bronzés - comme Chris vdH, camarade de kitesurf de Marc qui, en échange de multiples informations sur la région, accepte de se faire offrir un verre -puis deux, puis trois- dans le cockpit de Panta Rhei en nous abreuvant d'histoires, dont la plus amusante sans doute est celle de son improbable participation au festival Burning Man l'été dernier).

Ici, dimanche 24, Luca fête son septième anniversaire - le deuxième à bord de Panta Rhei - et, après un réveil sous une montagne de cadeaux, il passe une journée exactement comme il l'avait souhaité: natation, kayak, chocolat et hot-dogs... et surtout pas d'aller-retour à terre!! Pour achever de satisfaire ses modestes désirs, nous installons une "cabane" sous la table du carré qui leur servira, à son frère et à lui, de chambre pour la nuit... Il s'endort comblé.

Quelques jours encore passés aux alentours de Georgetown, tandis que la terrible nouvelle de l'hospitalisation en urgence de notre bon Fred nous parvient. Nous nous sentons bien loin et terriblement démunis, mais toutes nos pensées, aussi émues qu'affectueuses, vont vers Gwena, Lucien et lui. Heureusement, un réseau d'informations efficace et bienveillant se met rapidement en place entre ses amis (merci Géraud et Valère) et nous pouvons suivre, presque en temps réel, l'évolution plutôt encourageante de sa condition. Go, Fred!

Le 28, nous reprenons la mer et avançons un peu le long des Exumas pour nous arrêter d'abord à Lee Stocking Island (sublime mouillage qui, pour ne rien gâcher, se trouve être voisin de Leaf Cay, propriété privée de Nicholas Cage...) puis à Little Farmers Cay, où l'ordinateur de bord tombe soudainement mort. Après l'autopilote, le générateur, la table du cockpit et la mega-lampe torche (précieuse compagne des quarts de nuit)... serait-ce la fin d'un cycle?

Tandis que Marc est rivé à son ordinateur portable pour y installer des cartes nautiques et commander, au moyen de la connection internet du "Ocean's Cabin" (dont le propriétaire, Terry, est une figure emblématique de la région), des pièces dont il suspecte qu'elles sont à l'origine de la panne de l'ordinateur de bord, je réalise que nous sommes aujourd'hui le dimanche de Pâques et qu'il doit y avoir, dans l'église St Mary's toute proche, des célébrations à ne pas manquer. Et en effet, c'est une messe que Luca, Vadim et moi n'oublierons pas...


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jeudi 14 mars 2013

Cuba, côte sud: 30 janvier - 12 mars

Mercredi 30 janvier, Nonna est encore visible sur le quai au loin, et nous sommes déjà secoués par la houle... Nous savions que la traversée du canal du Yucatan -surtout dans le sens du retour vers Cuba- serait pénible à cause de la mer levée par le Gulf Stream. Mais nous n'imaginions pas ce qui nous attendait pour ces 36 heures de navigation vers l'est: malgré une météo plutôt favorable (30 noeuds de vent, quand même, mais orientés sud est), nous subissons tous -sauf Luca, qui fait preuve encore une fois d'une résistance à toute épreuve- la première journée avec grand peine, affaiblis par d'épouvantables nausées dans une mer totalement confuse. Seule consolation, celle de naviguer de concert avec Sandokan, un bateau hispano-chilien rencontré à la marina de Puerto Morelos au Mexique et skippé par le charmant Marcos: de temps en temps, nous nous appelons par VHF pour prendre des nouvelles les uns des autres. On se sent moins seul...

Les conditions, heureusement, s'apaisent un peu la nuit de sorte que les enfants, au moins, peuvent dormir plus ou moins normalement. Vers 17 heures, jeudi 31, nous arrivons au mouillage devant la marina a la Isla de la Juventud - quoique n'étant pas un port d'entrée dans le pays, les autorités s'y montrent conciliantes et tolèrent notre présence (inutile d'envisager, toutefois, de quitter le bateau et de  mettre un pied à terre) pour la nuit ainsi que la journée du lendemain afin de laisser passer le fort vent causé par le front de nord qui rendrait notre progression très difficile vers Cayo Largo où doivent être accomplies les formalités d'entrée. Il faut dire que, pour 6.000 km de côtes, Cuba compte sept (!) "marinas" en dehors desquelles il n'est pas question d'entrer ou de sortir du pays. Comme si cela ne compliquait pas assez les choses, les déplacements de mouillage en mouillage dans les eaux cubaines sont, eux aussi, très strictement surveillés: l'ancrage n'est pas autorisé partout - loin de là - et quand il est permis, il reste sujet à d'incontournables démarches (consistant parfois pour les "officiels" nous rendant visite à bord en un griffonnage, sur un coin de papier, des informations relatives au bateau et à son équipage - peu importe, du moment qu'il y a contrôle...).

24 heures de traversée, encore, pour rejoindre laborieusement Cayo Largo à l'est (nous serrons le plus possible le vent qui souffle presque face à nous, mais n'échappons pas à quelques bords qui rallongent la route). Samedi 2 février, double surprise à l'arrivée: l'eau est de plus en plus belle à mesure que nous approchons (nous finissons sur un mer turquoise et transparente, laissant voir les fonds de sable blanc éclatant...), et la famille Chavanon au grand complet nous accueille en nous escortant en dinghy jusqu'au ponton de la marina. Ces bons vieux Pingouin! Il s'agit de profiter au maximum de ces quelques jours à passer ensemble, car suite à un changement dans leur programme de navigation, nos routes vont se séparer lorsque, autour du 10, ils fileront vers le Mexique avant de descendre au Bélize et au Guatemala puis de remonter (peut-être...) vers la Floride, les Bermudes, puis l'Europe.

Nous sommes rejoints assez vite par Jérémy, sur son bateau Manao, et allons passer tous ensemble trois jours à jouer les Robinsons autour de Cayo Rosario, à 20 milles de Cayo Largo: pêche sur le récif, nage, construction de cabanes et ramassage de trésors divers sur la plage... Rires et chansons dans le cockpit le soir, et même un gâteau pour mon anniversaire, avec un brin d'avance!

Le 8, nous nous disons au revoir avec le coeur serré et la tête pleine de tous les souvenirs rassemblés en commun pendant 8 mois de navigation (presque) conjointe... Salut les copains, quelle belle et bonne rencontre ce fût. Qui sait où et quand nous nous reverrons... D'ici là, prenez soin de vous.

Trois jours plus tard, à Cayo Largo, nous accueillons très excités Ariane et Max arrivés bravement jusque là après un voyage de près de deux jours comprenant une courte nuit à La Havane. C'est leur troisième (!) visite à bord, les présentations ne sont donc plus à faire... Leur présence est d'emblée naturelle et les conversations, comme les jeux des enfants, reprennent comme si elles avaient été à peine  interrompues. Avec eux, nous passons quelques jours de mouillage en mouillage (dont un retour à Cayo Rosario) - pêche à la langouste, plage et collection de carcasses de crabes - avant de retourner à la marina de Cayo Largo d'où nous cherchons désespérément à découvrir un peu le reste de l'île. En vérité, il n'y a rien ici que quelques hôtels, tous propriétés de l'Etat et pratiquement identiques à quelques nuances près: taille et "style" architectural (façon colosses de béton défraîchis -ont-ils jamais été neufs?- avec ça et là un mur turquoise ou jaune, et/ou une fontaine -invariablement sèche- pour égayer un peu), formule all inclusive - tout, jusque dans la composition des buffets et les "divertissements" proposés (toujours un échiquier géant et un cours d'aquagym donné sans conviction par une jeune femme au généreux postérieur, ou un match de volleyball sur la plage - oups, il n'y a plus de filet) semble uniformisé. Aussi nous faisons, avec quelque appréhension mais finalement pas trop de scrupules, l'étrange expérience de passer deux journées presque complètes au bord de la piscine de l'hôtel Sol Cayo Largo, "comme si" nous y étions clients, à nager, boire et manger sans débourser un sou. Une formule gagnante pour tout le monde, quand on réalise que l'on peut par la même occasion se procurer directement auprès du responsable des cuisines, ravi de se mettre un billet en poche, quelques légumes frais si difficiles à trouver en l'absence totale de magasin d'alimentation sur l'île. Un avitaillement por la mano izquierda, à la cubaine...

La semaine a filé vite, et voilà déjà Ariane et Max repartis dans un coucou d'Air Gaviotta vers La Havane, d'où ils rentrent à Bruxelles... Du fond du coeur merci d'avoir bravé la distance, les nausées, le décalage horaire et le dépaysement total de la vie en mer pour venir, encore une fois, partager un morceau de l'aventure. Ta présence pendant ce voyage, Ariane, aura été une constante très précieuse...

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Mercredi 20 février, après avoir surmonté les incontournables démarches de sortie, nous quittons Cayo Largo et nous mettons doucement en route vers Cienfuegos, avec une halte en chemin pour la nuit à l'abri (relatif) derrière une caye perdue. On continue donc à avancer vers l'est, soit contre les vents dominants. Nous ne nous accordons que peu de temps pour visiter Cienfuegos: quelques flâneries dans les rues du centre historique, un tour en calèche, une tentative laborieuse de trouver du ravitaillement et, surtout, une visite dans une école ("El Guerillero Heroico") pour donner à d'irrésistibles enfants en uniforme (béret orné d'une étoile et portrait du Che accroché à la chemise...) les jouets soigneusement sélectionnés par Luca et Vadim parmi les boîtes accumulées dans le bateau.

En vue de l'arrivée imminente de mes parents, a.k.a. Poupik-et-Mami, nous continuons notre route rapidement pour arriver à Trinidad le 23. Le lendemain, à la "marina" (encore une fois des installations défraîchies et inachevées), nous les cueillons au sortir du taxi qui les amène de La Havane (6 heures de route!). Embrassades, effusions, grande joie. Ensemble, nous décidons de revoir à la baisse les plans ambitieux que nous avions initialement prévus pour leur séjour à bord, consistant en une navigation de près de 120 milles jusqu'à l'extrémité est de l'archipel des Jardins de la Reine. Pour ne pas devoir cravacher et donc mieux profiter de leur présence à bord (et pour éviter, aussi, des problèmes administratifs liés à leur débarquement hors d'un port pourvu d'un bureau d'immigration), nous visons donc de faire des ronds dans l'eau dans les cayes proches de Trinidad, et de terminer par la visite de la ville.

Sans conteste, c'était la bonne décision: le rythme des navigations, quotidiennes mais assez courtes, nous laisse largement le temps de profiter des mouillages, nageant, pêchant, lisant, parlant, jouant... et partageant le rhum-citron du soir dans le cockpit au coucher du soleil. Quatre jours passés à vivre ensemble à bord; leurs deux précédentes visites, à Majorque et à Washington, ayant été essentiellement terrestres, nous sommes tous les quatre ravis de partager vraiment avec eux ce qui fait notre quotidien depuis près de deux ans, et enchantés de voir comme ils y trouvent spontanément leur place. Point d'orgue de leur séjour, une journée de promenade sur les pavés de Trinidad (et un bain chaud dans le ravissant hôtel Iberostar!) à l'atmosphère exquise... Merci, Papa et Maman, Poupik et Mami, de votre visite qui nous a comblés.


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Pendant deux jours après leur départ, nous restons à l'ancre devant la marina de Trinidad avant de repartir, mardi 5 mars, pour avancer autant que possible à la faveur d'une météo annonçant des vents inhabituellement peu orientés est. Notre but, en effet, est de longer la côte pour contourner la pointe est (Punta Maisi) et rejoindre, sur la côte nord, le premier port de sortie, Puerto Vita, d'où nous traverserons vers les Bahamas. Les conditions, en effet, se révèlent extraordinairement favorables: le vent est assez irrégulier, surtout la nuit (ce qui suppose des ajustements presque constants de voilure et le sommeil est donc rare -surtout pour Marc...) mais l'allure est bonne et nous avançons avec un vent soufflant plutôt du nord, presque au travers - à mille lieues de la lutte que nous pouvions craindre au près serré dans les vents d'est dominants... Good planning, capt'n! Finalement, nous avalons d'une traite 400 milles nautiques (au large de Guantanamo, nous sommes interpellés poliment à la VHF par les coastguards américains, qui s'étaient approchés de nous en faisant vrombir les moteurs de leurs vedettes, pour nous signifier que nous ne devons pas nous aviser de changer de cap car la navigation est interdite à moins de trois milles de l'entrée de la baie) et arrivons vers 10 heures du matin le vendredi 8, trois nuits et trois jours après notre départ de Trinidad, à Baracoa à l'extrémité nord-est de Cuba. Fatigués mais contents...

Sur notre lancée, et pressés par la météo qui prévoit une fenêtre limitée pour la traversée vers les Bahamas les 12 et 13 mars, nous continuons notre chemin dès le lendemain de notre arrivée à Baracoa, pour avancer d'une quarantaine de milles par jour jusque Cayo Moa, puis Bahia de Nipe, et enfin Puerto Vita, ne nous arrêtant que pour la nuit.

Mardi 12 mars, nous rendons aux autorités cubaines nos visas et remplissons les derniers formulaires de sortie, puis mettons le cap au nord pour Long Island, dans le sud des Bahamas. Encore 150 milles nautiques, 24 heures de traversée, pour méditer sur ce mois et demi passé à Cuba: la sensation d'y être coupé du monde (internet, ici, est pratiquement inexistant, ce qui explique mon 'silence' sur le blog pendant tout ce temps), le dénuement et la décrépitude, l'obsession des contrôles, parfois en dépit du bon sens - autant de stigmates de la chape de plomb imposée par Fidel qui rend le pays anachronique à bien des égards et assez peu "accueillant" pour la navigation. Mais aussi des kilomètres de côtes vierges, des mouillages magnifiques, une pêche miraculeuse, des décors étonnants, de la musique, des visages souriants et aimables, et des tonnes de souvenirs, encore, qui émaillent notre aventure...




mercredi 30 janvier 2013

Mexique: 4 - 30 janvier

Jeudi 3 janvier. Les Périer viennent de partir, laissant derrière eux un grand vide à bord. Pour ajouter à l'humeur maussade, le temps est brumeux et n'invite pas à la promenade au large. En outre, nous sommes tous les quatre un peu fatigués de naviguer, usés par la quantité de milles parcourus dernièrement (en un mois et demi, entre le départ de Washington début novembre et l'arrivée à La Havane mi-décembre, l'équivalent de 3.000 kilomètres avalés...). Pourtant, la météo promet une bonne fenêtre pour la traversée vers le Mexique, qui ne peut pas se faire dans n'importe quelles conditions étant donné que le Gulf Stream est particulièrement puissant dans le canal du Yucatan que nous devons franchir à angle droit pour arriver près de Cancun: si le vent est trop fort et/ou mal orienté (c'est-à-dire, contre la direction du courant), il peut lever une mer forte et dangereuse.

Nous prenons donc, à contre-coeur, la décision de partir dans la foulée - avec la perspective réjouissante, une fois arrivés, de ne plus bouger pendant près d'un mois incluant la visite de Nonna avec qui nous sillonnerons le Yucatan!

La navigation, finalement, sera presque parfaite compte tenu des conditions particulières de traversée du Gulf Stream: la brume se lève faisant place à un ciel inconditionnellement bleu et le vent, qui souffle au nord-est, est portant et suffisamment faible pour ne pas lever trop de houle. Hormis les derniers cinquante milles, pendant lesquels le courant pousse contre nous à une force de 4 à 5 noeuds (c'est beaucoup), creusant une mer qui nous fait vivre une expérience comparable à celle d'un vêtement dans le tambour d'une machine à laver, les 26 heures de cette traversée tant appréhendée auront été presque agréables!

Contrastant avec l'improbable quai de Los Morros laissé derrière nous à la pointe ouest de Cuba, la marina El Cid de Puerto Morelos (à une trentaine de kilomètres au sud de Cancun) est jolie, fleurie, accueillante et parfaitement entretenue. Pour limiter de dépaysement, cependant, on comprend vite qu'ici aussi, les démarches administratives d'entrée sont longues et fastidieuses: il faudra presque la journée complète pour finaliser la paperasse et accueillir à bord le défilé de fonctionnaires en uniforme.

Une fois cette épreuve surmontée, nous pouvons nous poser enfin et profiter abondamment de la gigantesque piscine de l'hôtel voisin, de la plage de sable blanc, de l'eau claire... et du temps retrouvé pour la classe. Pendant une bonne semaine, nous paressons joyeusement, quittant seulement la marina pour visiter le joli village de Puerto Morelos tout proche ou pour aller faire (encore!) un substantiel avitaillement à Cancun (qui se révèle sans aucun intérêt).

Le 15 janvier vers 23h, après plus de 24 heures de voyage depuis Milan, Nadia/Nonna arrive enfin, guillerette et fraîche comme une rose... Les enfants devront attendre le lendemain matin pour le câlin qu'ils attendent depuis si longtemps, mais Marc et moi profitons déjà pleinement des retrouvailles. Comme à chaque fois (c'est sa quatrième visite sur Panta Rhei, quand même...), elle trouve instantanément et tout naturellement ses marques à bord. Sauf que cette fois-ci, il s'agit d'une visite un peu différente: avec la voiture qu'elle a louée à Cancun, nous partirons pendant 10 jours pour une incursion en pays maya. Des vacances pour nous, en quelque sorte, puisque nous laisserons le bateau sous la surveillance de notre charmant voisin de quai barcelonais Marcos pour explorer, par la route, la région du Yucatan.

C'est un cadeau formidable que nous fait Nadia, et que nous savourons tous pleinement: 10 jours de découvertes, de promenades, d'émerveillement entre Chichen Itza, Izamar, Merida, Celestun, Uxmal, Valladolid, Coba et Tulum. 10 jours inoubliables, intenses et passionants pendant lesquels nous nageons dans des cenotes (gigantesques puits naturels utilisés par les Mayas comme lieux de sacrifices et/ou réserves d'eau douce), visitons des monastères, flânons dans les villes à pied ou en calèche, marchons dans des grottes, escaladons des temples mayas et prions le dieu Chaac-au-long-nez, admirons de tout près des colonies de flamands roses, traversons la mangrove dans une petite barque à moteur, dormons dans des huttes sur la plage, roulons dans les vagues, mangeons de la purée de haricots noirs au petit déjeuner, et nous faisons même  poursuivre par un crocodile énervé! Que d'aventures... MERCI, MERCI, MERCI Nonna!!

Nous nous apprêtons maintenant à reprendre la mer pour retourner vers Cuba - la côte sud, cette fois. La météo étant temporairement favorable, nous partirons finalement demain matin, 31 janvier, sans Nadia qui, après avoir tâté l'idée de traverser avec nous, a décidé sagement de rester dans la région pour ne pas rater son vol de retour vers l'Italie depuis Cancun dans deux jours. On se console en pensant aux prochaines retrouvailles...

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mardi 8 janvier 2013

Cuba, part II: 26 décembre - 3 janvier

***L'album picasa auquel renvoie la légende de la photo sur le dernier "post" (Cuba part I) a été mis à jour et contient à présent l'entièreté des photos de La Havane jusque Noël.***

Mercredi 26, nous faisons un baluchon et embarquons, frétillants d'impatience, dans un taxi pour La Havane, où nous allons retrouver la famille Périer presque au complet (la petite Jade, que Marc n'a pas encore rencontrée puisqu'elle est née peu après notre départ, est restée entre les mains expertes et aimantes de ses grand parents à Bruxelles).

C'est un bonheur immense, intense et incomparable que de revoir, comme si on les avait quittés la veille, de si chers et si anciens amis. Les retrouvailles sont chaleureuses, simples, immédiates.

Nous passons ensemble un délicieux après-midi à flâner dans la vieille ville, les enfants ayant vite fait de former, Cassandre et Vadim d'un côte, Félix et Luca de l'autre, deux binômes parfaitement harmonieux. Une journée joyeuse, terminée en beauté dans le magnifique hôtel en face du Capitolio où nous fêtons à la fois nos retrouvailles et, avec un décalage qui fait d'autant durer le plaisir, les 40 ans de Marc.

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Jeudi 27, après un avitaillement limité (nous étions prévenus, on trouve peu de choses à Cuba, même à La Havane), nous réintégrons le bateau à huit, impatients de (re)commencer à naviguer le lendemain. Légère inquiétude quand, au moment de régler la facture de la marina, notre ami Jérémy du bateau Manao refuse de payer au harbour master le pourboire très officiellement inscrit sur la note et que, du coup, l'ordinateur "tombe en panne" (sic), nous empêchant tous de mener à bien les démarches de sortie...  Malgré l'insistance de Marc et plusieurs allers-retours au bureau jusqu'au début de la nuit, le "patron" ne veut plus rien savoir et reporte à plus tard le règlement de la facture et l'approbation (obligatoire) de notre despacho, feuille de route indiquant précisément tous les endroits où nous comptons mouiller l'ancre. Si le problème informatique est réglé (Inch Allah, dirait-on ailleurs), tout cela devrait pouvoir être envisagé le lendemain matin.

Fort heureusement, la nuit a ressuscité l'ordinateur et remis le harbour master dans de bonnes dispositions. Aussi, nous pouvons larguer les amarres et, après une nouvelle halte au quai d'accueil pour la visite de sortie des douanes, de l'immigration, des autorités sanitaires et du bébé cocker, nous prenons enfin la mer.

La côte nord de l'île est très sauvage et l'accès à terre y est interdit, sauf à certains endroits désignés moyennant autorisation préalable. Nous avons prévu (et fait approuver par despacho interposé) trois haltes sur notre route vers la pointe ouest.

La première, Bahia Honda, est une vaste baie déserte dans laquelle on entre en slalomant entre les épaves de cargos... Une fois à l'intérieur, on est frappé par le calme absolu et l'absence totale de lumière sur la côte pouvant indiquer la présence d'un village. Nous y sommes absolument seuls (mais recevons néanmoins la visite d'un Cubain sorti d'on ne sait où et venu vérifier les papiers, autorisations, passeports et autres cachets) et y dégustons, avec moultes grognements de satisfaction, le thon blanc pêché l'après-midi même (le premier d'une série!) et transformé en sushis par cet Alpha Male de Capt'n Marc.

Il fait grand beau, le vent est favorable, tout le monde est bien à bord (mention spéciale à Félix qui, seul à souffrir du mal de mer, mord admirablement sur sa chique) et nous passons encore toute la journée du lendemain à naviguer jusqu'à notre deuxième étape, Cayo Levisa où nous arrivons avec les derniers rayons du soleil en zigzaguant entre les patates de corail. Le stress de l'arrivée est rapidement dissipé à coups de rhum et de bonne conversation... Là, nous passons deux jours -et la nuit du Nouvel An, avec Pingouin et Manao- à profiter allègrement de joies de la plage.

Troisième étape, la toute petite Cayo Julio où nous nous arrêtons le temps d'un bain de mer et d'un dîner avant d'entamer, en navigation de nuit, le dernier morceau de route avant la "marina" de Los Morros à l'extrémité ouest où les Périer nous quitteront pour passer encore deux jours à visiter l'intérieur de l'île avant de s'envoler vers l'hiver bruxellois.

C'est avec le coeur très serré et la tête déjà pleine de merveilleux souvenirs que nous les accompagnons sur l'improbable quai de Los Morros, au parfum de bout-du-monde, pour les regarder partir.


Merci merci à tous les quatre de votre visite, de votre enthousiasme et de votre indéfectible amitié, et merci de nous avoir gâtés de votre présence...


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