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lundi 30 juillet 2012

Newport - 13 - 31 juillet

Evidemment, le contact avait été pris, quelques jours avant notre arrivée à Newport, avec Arnoud, vieux copain belge d'-il-y-a-quinze-ans-a-Londres: il est installé dans la ville depuis quelques années, et on se réjouissait de le revoir, ainsi que de rencontrer sa femme Lizz et leurs deux garçons, Félix et Adrien.

Mais dès le moment où le chantier qui devait effectuer quelques travaux sur Panta Rhei (safran, antifouling) nous a indiqué que nous ne pourrions pas rester à bord une fois le bateau sorti de l'eau, ce qui devait être un tea-time rendez-vous s'est transformé en une installation en bonne et due forme dans la maison de Villegas: au total, plus de dix jours de cohabitation, dans une atmosphère joyeuse et animée, en immersion totale dans la vie de cette délicieuse famille belgo-américaine. Une maison charmante, un magnifique nid douillet ("un gnagnagna" digne de ce nom, un beau, un vrai) pour nous quatre dans une jolie chambre décorée de souvenirs discrets de leur vie à New Delhi, un jardin ombragé juste ce qu'il faut, une voiture (qui aura permis à capt'n Marc d'aller tous les jours jusqu'au chantier situé à Jamestown, de l'autre côté de la baie, superviser l'avancement des travaux et mettre la main à la pâte - merci Arnoud!!!), une machine à laver (alléluia!)... mais surtout Arnoud, et Lizz, Félix et Adrien, dont nous avons tous les quatre énormément apprécié la compagnie, la disponibilité et l'immense générosité.

Ortémi et Pingouin étant aussi à Newport, nous avons (bien sûr) connecté avec eux. Impossible d'envisager autre chose que de les voir tant que possible!

Arnoud, qui regardait hier soir mes photos de notre séjour ici, rigolait: "Très sympa - mais tu n'as pas une seule photo de Newport!" C'est vrai, le circuit touristique nous a quelque peu échappé - mais entre le Baileys Beach Club, les quelques navettes jusqu'au lieu du stage d'été de Félix (le Norman Bird Sanctuary, quelle beauté!), le cocktail chez Robert au bord de l'eau, avec zakouskis peanut butter-fried bacon (!), l'après-midi à la piscine chez Grampa, le diner chez Isabelle, les courses chez Trader Joe's à une demi-heure de voiture de la ville, l'achat du homard à prix réduit directement chez le pêcheur dans un hangar à côté du boatyard, la session "tie-dying" de t-shirts dans le jardin, la plage de Mackerell Cove, le Folk festival suivi depuis le cockpit de Panta Rhei (enfin de retour dans l'eau...) ou les longues soirées sur la terrasse à profiter de la fraîcheur du soir, nous en étions presque à nous prendre pour des vrais Newporters...

Quelle joie, et quelle chance nous avons eue, de vivre ainsi de l'intérieur une ville étrangère, guidés par des amis bienveillants; MERCI infiniment, Lizz et Arnoud, mais aussi Félix et Adrien, pour votre hospitalité qui nous a été droit au coeur. Comment aurions-nous fait sans vous?


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samedi 21 juillet 2012

Tour de Manhattan et Long Island Sound: 6 - 13 juillet

6 juillet. Une heure avant que le réveil, pourtant branché pour 6h45 (!), ne sonne, Marc est déjà affairé à récupérer les deux ancres. Nous commençons, aidés par une marée et des courants favorables, notre descente de la Hudson River. Dans la lumière dorée du point du jour, nous saluons d'assez près Lady Liberty dont la torche et la couronne semblent faits de feu. Nous sommes tous les quatre émerveillés.

Passée la pointe sud de Manhattan, nous remontons l'East River -toujours au moteur- et passons dans un calme étonnant sous le Brooklyn Bridge puis le Manhattan Bridge; la vision est magique. Frayeur (heureusement brève) lorsque l'hélice du moteur cale après qu'un bruit sourd ait retenti sous la coque: dans le faible remous du bateau, nous voyons remonter à la surface, après quelques minutes, une gigantesque bille de chemin de fer - nous avions été droit dessus... * Mais dans ce bref intervalle, Marc avait déjà branché la VHF sur le 16 (canal d'urgence) et commencé à dérouler le génois. Incontestablement, le capitaine a de bons et rapides réflexes...


* Pour quiconque se soucierait de savoir si elle a fait des dégâts, il est évident qu'à l'heure où j'écris ceci Marc a déjà plongé (à vrai dire, le soir même) pour s'assurer que rien n'était endommagé: pas une trace de choc. That was lucky...

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Nous entrons dans le Long Island Sound, sorte de mer intérieure formée au nord par la côte du Connecticut et au sud par l'île de Long Island. La mer est très calme, évidemment, sauf lorsque passent en trombe les navettes qui relient les deux côtés. Nous arrivons à 19h30 dans Oyster Bay où nous jetons l'ancre. Nous découvrirons le lendemain que le paysage au bord de l'eau (saumâtre, verdâtre et opaque, en somme pas très invitante) est composé exclusivement de maisons gigantesques nichées dans des parcs privés. Ce n'est pas l'envie qui nous manque d'aller explorer le coin, mais on ne peut laisser le dinghy nulle part. Nous passons donc beaucoup de temps à bord, et Marc en profite pour gratter avec acharnement, au moyen de 65 plongées successives en apnée, les coquillages qui recouvrent entièrement la coque sous la ligne de flottaison. En somme, notre seul contact avec la terre là-bas aura été un aller-retour dans une marina aux allures de chantier, sans charme - mais, entre la découverte de plusieurs carcasses de limules (!) et la visite de la plaine de jeux, les enfants ont trouvé l'étape formidable...

Dans notre progressions à travers le Long Island Sound, nous découvrons aussi les magnifiques îles Thimble, archipel de petits îlots quasi-tous occupés par une vaste maison en bois et un jardin fleuri dégoulinant dans l'eau. S'il n'y avait, dans tous ces jardins (sans exception), de hauts mâts arborant d'immenses drapeaux américains, on pourrait s'imaginer en Suède...

Dernières étapes avant de quitter le Connecticut pour Rhode Island, Shelter Island et Sag Harbour (destinations chic des Hamptons où les New-Yorkais de Wall Street viennent en avion passer le weekend dans des maisons cossues, sans grand intérêt mais avec quelques vestiges du XVIIIème siècle. L'ambiance est un peu celle d'un ghetto mais l'accueil est charmant, pour ce que nous en avons déduit de l'efficacité des déplacements en auto-stop...), puis Block Island. Cette dernière halte est magnifique: nous parcourons le sud de l'île en vélo sous un temps parfait, sur les routes désertes qui serpentent entre les jardins aux immenses massifs d'hortensias bleus, et nous arrêtons ça et là pour nous rafraîchir au bord de la mer.

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vendredi 6 juillet 2012

New York City, 17 juin - 6 juillet

Dimanche 17 juin. New York! Cinq semaines de belgitude intensive (merci à la famille, aux amis et à l'école pour votre accueil chaleureux et votre présence affectueuse - grâce à vous on n'a (presque) pas remarqué qu'il faisait à Bruxelles un temps quasi-automnal...) et deux vols transatlantiques après nos adieux à Saint Martin, et voici enfin le temps des retrouvailles! Marc nous cueille à JFK, après que nous ayons passé sans trop de peine la double épreuve de l'interminable file et de l'interrogatoire à l'entrée sur le territoire américain. Il est toujours aussi beau, bronzé et souriant près sa navigation hauturière à travers le Gulf Stream, et impatient de nous faire découvrir le mouillage où le bateau nous attend.


En effet, c'est saisissant: notre belle Panta Rhei, celle-là même qui, depuis un an, nous a amenés de Malte aux Canaries, en passant par la Sardaigne, la Corse, les Baléares et Gibraltar, puis tout le long de l’arc antillais, est à présent accrochée au quai (un peu fatigué, mais vaillant) du Boat Basin situé à l’extrémité de la 79ème rue dans l’Upper West Side de Manhattan. A cinq minutes à pied de Broadway, dix minutes de Central Park, voilà un point de départ idéal pour nos explorations quotidiennes!


Le contraste, évidemment, est immense et radical avec l'isolement et le silence des mouillages que nous avons fréquentés pendant les cinq mois de notre saison caraïbe. N'est-ce pas là justement que réside la magie de ce voyage? Ce qui nous attend ici n'a rien de commun avec ce que nous avons vécu jusque là. Pourtant, nous continuons d'être "à la maison" sur le bateau - et nous plongeons bien vite dans la frénésie citadine...


Par ailleurs nous nous régalons de la présence, au même mouillage, d’Ortemi (Tea, Mirko et Aurélien, dont nous avons croisé la route pour la première fois à Gibraltar en octobre dernier) et Pingouin (Perrine, Jean-Michel, Martin, Caroline et Rémi, rencontrés au Saba Rock grâce à Ortemi, juste avant de quitter les BVIs pour Saint Martin): les journées sont souvent passées ensemble, en tout ou en partie, et les enfants forment une très joyeuse bande. Entre les grands comme entre les petits, l’alchimie fonctionne à merveille et on en redemande... 


Pendant près de trois semaines, finalement (ce devait être une dizaine de jours, mais nous n'avons pas cessé de prolonger le séjour, tant la ville magnétise, envoûte, fascine), nous marchons sans relâche et nous promenons, les yeux grands ouverts, dans la chaleur caniculaire de cette métropole immense, grouillante et extraordinairement variée. Interrogés sur ce qu'ils retiendront de New York, les enfants répondent sans hésiter: les moments passés avec les copains, les écureuils (et les aigles!) de Central Park, les fontaines dans les plaines de jeux, l'expédition à Coney Island ou la sortie cinéma avec leur papa, et...les vendeurs de hot-dogs.


Il y a eu tant de beaux et bons moments qu'il serait bien difficile de les relater chacun en détail: flânerie dans Chinatown, Greenwich Village ou autour de Times Square; promenade sur la High Line (ancienne ligne de chemin de fer aérienne reconvertie en promenade verte surplombant la ville); visite du Guggenheim, du MoMa ou du Musée d'Histoire Naturelle; quelques pas de boogie dans la fraîcheur du soir lors d'un concert en plein air de Charlie Watts devant le Lincoln Center; concert/brunch au Lenox Lounge à Harlem; ascension de l'Empire State Building; balade en vélo sur le Brooklyn Bridge et dans le Financial District de Manhattan - sans compter, le soir du 4 juillet, la visite à bord de Kate (vieille amie de la famille, “vraie” new-yorkaise et néanmoins émerveillée par le spectacle de la ville depuis le bateau...) et les sublimes feux d'artifice tirés sur la Hudson River, admirés aux premières loges, à 17 (!) sur le pont de Panta Rhei! 


Parce que les meilleures choses ont une fin, il va falloir que l'on s'arrache pour entamer notre remontée de la côte est... Le départ est prévu demain à l'aube, les courants et les marées étant tels dans la rivière qu'il faut impérativement viser une fenêtre de départ précise afin de ne pas risquer de faire du sur place... voire même de reculer! 

dimanche 1 juillet 2012

Traversée St Martin - Bermudes - New York: 26 mai - 13 juin

26 mai: mon équipage de traversée débarque. Dix jours déjà que Céline et les enfants sont partis à Bruxelles. Dix jours de travaux divers et d'entretien saisonnier sur Panta Rhei pour le capitaine (qui se distrait ainsi de la cruelle absence), et voici enfin approcher, comme une libération, le temps de la navigation.  Et quelle navigation !

1700 milles d'une superbe diagonale à travers l'Atlantique Nord pour rallier les Caraïbes à New York. Finis les alizés, le ciel cotonneux et les mers tempérées. Nous rentrons ici dans le régime des dépressions altantiques qui se forment en continu le long de la côte Est des Etats Unis et du Canada. Celles-ci ont la réputation de rapidement lever des conditions de mer effroyables, surtout au nord des Bermudes, et sont craintes par tous les marins transitant dans la région.

Pour ceux qui entament la transat dite "retour" vers l'Europe, le jeu consiste à surfer autour de ces systèmes dépressionnaires vers les Açores en restant suffisamment au sud pour éviter de se retrouver piégé dans des conditions dangereuses. Mais pour ceux qui rejoignent le nord des Etats Unis, pas d'autre choix que de rentrer dans la mêlée, si possible à la faveur d'un bon créneau météo, mais en se préparant quoi qu'il arrive à subir du gros temps. Le capitaine et ses trois équipiers, Jérôme Spriet (photographe, esthète et passionné de mer), François Podevyn (fonctionnaire anarchiste et vieux loup de mer) et Pierre Podevyn (fils de ce dernier, guitariste hypotendu et candidat au rêve americain) sont prêts au combat !

28 mai: nous lâchons les amarres d'un quai solitaire de Sint Maarten, et prenons la route vers les Bermudes - pour un arrêt pipi avant New York.

Les 900 milles qui nous séparent de l'archipel sont parcourus en sept jours et sans grand incident. Les conditions que nous rencontrons sont même assez calmes, tandis que la tempête tropicale Beryl laboure l'ocean Atlantique à 500 milles à peine à l'ouest de notre position et menace de converger vers nous si nous traînons en chemin. Son passage au nord des Bermudes et les perturbations qu'elle laisse dans son sillage nous obligeront a marquer un arrêt plus long que prévu (cinq jours) dans la baie de St Georges avant qu'il ne devienne possible de reprendre la mer vers New York dans des conditions négociables.

Cette halte forcée constitua finalement une bien agréable surprise: les Bermudes, perdues au milieu de l'Atlantique, sont d'une beauté inattendue, et nous y faisons de belles rencontres, locaux et marins de passage confondus. Nous y retrouvons aussi, avec grand plaisir, nos amis des bateaux Ortemi et Pingouin, que nous avions quittés aux BVIs un mois plus tôt.

8 juin: nous nous engouffrons juste derrière le dernier front froid et partons au près sous la pluie et dans une mer toujours formée. Cap au nord-ouest, pour 700 milles jusqu'à Manhattan. La météo est capricieuse, avec plusieurs bascules de vent prévues et des allures de près qui rendent indispensable un routage précis afin de garder de la vitesse et éviter de rallonger le voyage (nous avons peu de marge de manoeuvre, puisque Jérôme doit impérativement être de retour en Europe le 15 juin). Mais dans l'ensemble, les conditions sont favorables. Le capitaine se permet d'ailleurs à mi-chemin une plongée en eaux froides pour extirper de l'hélice une sac plastique pêché en route. Seule source d'anxiété, le passage du Gulf Stream, gigantesque tapis roulant océanique propulsant des milliards de litres d'eau à près de quatre noeuds vers le nord de l'Europe. Ce puissant courant, quand il est combiné à des vents contraires, peut générer une mer déferlante et dangereuse. Or, justement, nous nous trouvons dans ce cas de figure, le vent soufflant de nord-est a 15-20 noeuds... interesting! Nous sommes en effet quelque peu chahutés mais Panta Rhei, tout le long, reste parfaitement manoeuvrante et étale la mer sans difficulte. God I love this boat!!

Seule la dernière nuit nous réservera une désagréable surprise: jusqu'à 40 noeuds de vent et une mer confuse qui fatigue le bateau et les hommes. Aussi, la vision du skyline de Manhattan se découpant dans la lumière naissante de ce matin pluvieux du 13 juin sera particulièrement magique. Dans le grand sac à souvenirs, le passage de Panta Rhei sous la Statue de la Liberté et sa longue remontée de l'Hudson River jusqu'à notre improbable mouillage de l'Upper West Side, au niveau de la 79ème rue, occuperont certainement une place toute spéciale...

15 juin: 12.000 milles nautiques (soit 21.000 kilomètres) parcourus sur Panta Rhei depuis son départ de Hollande - et nous voici à Harlem, à deux heures du matin dans la mythique Zebra Room du Lenox Lounge, assistant à une jam session improvisée a laquelle, un demi-siècle plus tot, on aurait pu voir participer Billie Holiday ou Thelonious Monk. Ce qui donne tant de saveur à ces instants, c'est sûrement le chemin qui y mène....

MERCI à Jérôme, François et Pierre pour cette nouvelle contribution au périple des Stockers on sea; le capitaine était une fois de plus très fier de son équipage ! Demain, Céline, Luca et Vadim me reviennent du plat pays et nous ouvrirons ensemble une nouvelle page de cette grande et belle aventure...

Dreams do come true!!!

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