Pages

dimanche 1 juillet 2012

Traversée St Martin - Bermudes - New York: 26 mai - 13 juin

26 mai: mon équipage de traversée débarque. Dix jours déjà que Céline et les enfants sont partis à Bruxelles. Dix jours de travaux divers et d'entretien saisonnier sur Panta Rhei pour le capitaine (qui se distrait ainsi de la cruelle absence), et voici enfin approcher, comme une libération, le temps de la navigation.  Et quelle navigation !

1700 milles d'une superbe diagonale à travers l'Atlantique Nord pour rallier les Caraïbes à New York. Finis les alizés, le ciel cotonneux et les mers tempérées. Nous rentrons ici dans le régime des dépressions altantiques qui se forment en continu le long de la côte Est des Etats Unis et du Canada. Celles-ci ont la réputation de rapidement lever des conditions de mer effroyables, surtout au nord des Bermudes, et sont craintes par tous les marins transitant dans la région.

Pour ceux qui entament la transat dite "retour" vers l'Europe, le jeu consiste à surfer autour de ces systèmes dépressionnaires vers les Açores en restant suffisamment au sud pour éviter de se retrouver piégé dans des conditions dangereuses. Mais pour ceux qui rejoignent le nord des Etats Unis, pas d'autre choix que de rentrer dans la mêlée, si possible à la faveur d'un bon créneau météo, mais en se préparant quoi qu'il arrive à subir du gros temps. Le capitaine et ses trois équipiers, Jérôme Spriet (photographe, esthète et passionné de mer), François Podevyn (fonctionnaire anarchiste et vieux loup de mer) et Pierre Podevyn (fils de ce dernier, guitariste hypotendu et candidat au rêve americain) sont prêts au combat !

28 mai: nous lâchons les amarres d'un quai solitaire de Sint Maarten, et prenons la route vers les Bermudes - pour un arrêt pipi avant New York.

Les 900 milles qui nous séparent de l'archipel sont parcourus en sept jours et sans grand incident. Les conditions que nous rencontrons sont même assez calmes, tandis que la tempête tropicale Beryl laboure l'ocean Atlantique à 500 milles à peine à l'ouest de notre position et menace de converger vers nous si nous traînons en chemin. Son passage au nord des Bermudes et les perturbations qu'elle laisse dans son sillage nous obligeront a marquer un arrêt plus long que prévu (cinq jours) dans la baie de St Georges avant qu'il ne devienne possible de reprendre la mer vers New York dans des conditions négociables.

Cette halte forcée constitua finalement une bien agréable surprise: les Bermudes, perdues au milieu de l'Atlantique, sont d'une beauté inattendue, et nous y faisons de belles rencontres, locaux et marins de passage confondus. Nous y retrouvons aussi, avec grand plaisir, nos amis des bateaux Ortemi et Pingouin, que nous avions quittés aux BVIs un mois plus tôt.

8 juin: nous nous engouffrons juste derrière le dernier front froid et partons au près sous la pluie et dans une mer toujours formée. Cap au nord-ouest, pour 700 milles jusqu'à Manhattan. La météo est capricieuse, avec plusieurs bascules de vent prévues et des allures de près qui rendent indispensable un routage précis afin de garder de la vitesse et éviter de rallonger le voyage (nous avons peu de marge de manoeuvre, puisque Jérôme doit impérativement être de retour en Europe le 15 juin). Mais dans l'ensemble, les conditions sont favorables. Le capitaine se permet d'ailleurs à mi-chemin une plongée en eaux froides pour extirper de l'hélice une sac plastique pêché en route. Seule source d'anxiété, le passage du Gulf Stream, gigantesque tapis roulant océanique propulsant des milliards de litres d'eau à près de quatre noeuds vers le nord de l'Europe. Ce puissant courant, quand il est combiné à des vents contraires, peut générer une mer déferlante et dangereuse. Or, justement, nous nous trouvons dans ce cas de figure, le vent soufflant de nord-est a 15-20 noeuds... interesting! Nous sommes en effet quelque peu chahutés mais Panta Rhei, tout le long, reste parfaitement manoeuvrante et étale la mer sans difficulte. God I love this boat!!

Seule la dernière nuit nous réservera une désagréable surprise: jusqu'à 40 noeuds de vent et une mer confuse qui fatigue le bateau et les hommes. Aussi, la vision du skyline de Manhattan se découpant dans la lumière naissante de ce matin pluvieux du 13 juin sera particulièrement magique. Dans le grand sac à souvenirs, le passage de Panta Rhei sous la Statue de la Liberté et sa longue remontée de l'Hudson River jusqu'à notre improbable mouillage de l'Upper West Side, au niveau de la 79ème rue, occuperont certainement une place toute spéciale...

15 juin: 12.000 milles nautiques (soit 21.000 kilomètres) parcourus sur Panta Rhei depuis son départ de Hollande - et nous voici à Harlem, à deux heures du matin dans la mythique Zebra Room du Lenox Lounge, assistant à une jam session improvisée a laquelle, un demi-siècle plus tot, on aurait pu voir participer Billie Holiday ou Thelonious Monk. Ce qui donne tant de saveur à ces instants, c'est sûrement le chemin qui y mène....

MERCI à Jérôme, François et Pierre pour cette nouvelle contribution au périple des Stockers on sea; le capitaine était une fois de plus très fier de son équipage ! Demain, Céline, Luca et Vadim me reviennent du plat pays et nous ouvrirons ensemble une nouvelle page de cette grande et belle aventure...

Dreams do come true!!!

click here to view photo album

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.