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dimanche 15 janvier 2012

Grenadines & Carriacou

Le 3 janvier nous quittons donc Sainte Lucie et continuons notre descente vers le sud. Marc prefere sauter Saint Vincent, qui a mauvaise presse, notamment sur noonsite.com (un site de nautisme qui repertorie une masse d'informations diverses et variees concernant les mouillages...du monde entier. Y compris, donc, les incidents de toutes natures, de la petite arnaque au cambriolage arme, survenus dans le coin: les Pirates des Caraibes - sans Johnny Depp, malheureusement). Nous partons explorer, l'une apres l'autre, toutes les autres iles composant l'Etat de Saint-Vincent-et-les-Grenadines, democratie parlementaire faisant partie du Commonwealth...

Le canal entre les iles de Sainte Lucie et Saint Vincent genere une acceleration du vent, et la mer y est grosse. Vadim sort rapidement son joker: la sieste. Il se reveille frais comme un gardon et nous arrivons, apres une petite quarantaine de milles, a Bequia (prononcer "Bekouez") ou nous apprecions l'atmosphere post-coloniale British un peu fatiguee, le sourire de la serveuse du salon de the "Gingerbread" et le carrot cake des tropiques.

Tout va bien donc sauf que...pas tant que ca au fond: Marc est courbature et se plaint d'avoir mal aux poumons tandis que Luca, pour la troisieme semaine consecutive, a des quintes de toux repetees qui le font presque vomir. Let's think positive.

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Le 5, nous quittons notre mouillage de Port Elisabeth et traversons vers Canouan, a peu pres vingt milles plus bas. Nous ancrons dans Charlestown Bay, dont la plage est presque entierement occupee par le Tamarind Beach Hotel, un peu defraichi mais charmant. Malheureusement, malgre qu'elle soit sous le vent (c'est-a-dire, a l'ouest de l'ile alors que les vents dominants soufflent de l'est), la baie laisse entrer la houle et le mouillage est un peu "rouleur". Pour raisons medicales, nous y passons quand meme trois nuits: Marc et Luca font tous les deux des pointes de fievre. Pas question de quitter le mouillage dans ces conditions (d'autant que ca souffle), je devrais prendre completement en charge, a peu pres seule -difficile a imaginer-, la navigation et les maoeuvres. Car la liste des bobos s'est allongee, ce 7 janvier, d'une grosse boule tres douloureuse apparue sur le coude gauche du capitaine. Soit celui dont depend l'operationnalite du bras dont il se sert le plus. Nos recherches sur internet nous apprendrons qu'il s'agit d'un hygroma, rien de grave mais parfois tres lent a se resorber... Soudain, l'isolement m'angoisse: s'il fallait voir un medecin, notre seule option serait de prendre un avion jusqu'a la Martinique! En outre notre avitaillement diminue, et ici on ne trouve rien...que des langoustes. Mais ou est donc Johnny Depp??

Apres avoir epuise les ressources de la medication "light", nous passons aux antibiotiques, puffs d'aerosols, antidouleurs et compresses d'alcool. Et nous pouvons profiter un peu des environs, en faisant une belle balade a travers le village, puis sur un sentier, jusqu'a la pointe nord est de l'ile, croisant des dizaines de tortues, ou en allant siroter un G&T au bar du Tamarind. Nous mettons aussi un point d'honneur a celebrer dans les formes notre premiere fete des rois tropicale: nous confectionnons une galette a l'allure plate et seche (soit une galette au sens tres strict) assez peu engageante, mais savoureuse comme tous les gateaux faits maison et, surtout, cachant un coquillage en guise de feve, choisi entre tous par les garcons sur la plage...

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Dimanche 8, les premiers signes de convalescence se manifestent, nous decidons de bouger. Prochaine etape, Mayreau, toute proche. Marc a le bras en echarpe, et sous ses instructions je fais de mon mieux, parfois laborieusement, pour regler l'allure: damn, cet enrouleur de genois ("Je tire, Marc, je ne fais que ca!"). Saline Bay est grande et raisonnablement peu peuplee de bateaux. A premiere vue, elle parait aussi moins "rouleuse" que la precedente. La plage est magnifique et quasi deserte: quelques jeunes adolescents s'amusent a plonger du ponton, et une dame au tres imposant posterieur visse sur une chaise plantee dans une tache d'ombre attend devant son echoppe temporaire -elle l'installe et la demonte tous les jours - son prochain client, dont on se demande d'ou il pourrait bien surgir... Apres avoir nage et s'etre roules dans le sable jusqu'a ressembler a des loempias, nous escaladons bravement la route qui monte a pic vers le village ou nous decouvrons, bonne surprise, un bar-resto avec une petite piscine. Miam. On y revient le lendemain.

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A Union, nous ancrons devant le Anchorage Yacht Club qui ravive des souvenirs de croisiere familiale il y a presque quinze ans, lorsque Marc, parfaitement a son affaire en milieu marin, avait passe tres haut la main l'examen paternel: "Dorenavant, mon cher Marc, tu peux m'appeler Francois"... Nous nous rendons aux bureaux de douane et d'immigration de l'aeroport pour faire le "check-out" (demain, nous quittons Saint-Vincent-et-les Grenadines) et poursuivons la promenade vers le village de Clifton, tres anime.

Magasins, echoppes, etals sont alignes tout le long de la route, et nous sommes ca et la interpelles par des vendeuses enthousiastes ("C'mon darling, wanna try a mango?"). Neanmoins, nous sommes encore une fois frappes par la faible quantite de produits que l'on trouve dans la region: les rayons des "supermarches" sont tres pauvrement fournis (j'ai quand meme repere un paquet de speculoos Lotus, des vrais de vrais, qui avait fait le voyage jusqu'ici...), les aliments frais sont quasi inexistants et tout est globalement tres cher: 35 Eastern Caribbean dollars (l'equivalent de 10 €) pour un paquet de cafe, 10 EC$ pour un pain, 30 EC$ pour une boite de cereales. Nous cherchons desesperement a nous ravitailler en fruits et legumes, mais ils sont rares et vendus au prix du caviar eux aussi: malgre qu'il pleuve beaucoup, on ne fait presque rien pousser localement, et les pommes sont importees de Washington, les oranges d'Espagne - meme les ananas et les bananes ne sont pas d'ici...

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Comme prevu, nous quittons Union apres deux jours pour rejoindre Carriacou, qui depend de Grenade, elle aussi appartenant au Commonwealth et derniere ile vers le sud avant de toucher les cotes venezueliennes... Apres un arret tres rapide a Hillsborough, principal village de l'ile, pour les formalites d'entree, nous nous dirigeons vers Tyrell Bay (mieux abritee) en nous arretant, tant elle est attirante,devant l'irreelle plage de la minuscule Sandy Island. Les pelicans tournent autour de nous et plongent en pique pour pecher, l'eau est turquoise, le sable blanc eblouissant. Par ailleurs, le retablissement de Marc et Luca se confirme.

Tyrell Bay est pleine de monde, quoique le paysage a terre semble assez desert. Il y a ici un tout petit chantier flanque d'une baraque en bois, le tout pompeusement baptise "Carriacou Yacht Club". Outre le bon abri que constitue la baie, les bateaux affluent (beaucoup semblent meme inoccupes, sans doute laisses la pour quelques semaines, ou quelques mois, par leurs proprietaires) pour la disponibilite de services de reparation. Cela n'a pas echappe a Marc, evidemment, et contact est deja pris avant notre arrivee sur l'ile avec un certain Dominique W., un Francais echoue ici il y a quinze ans qui s'est amenage un atelier de mecanique et de soudure sur le pont d'un tres vieux trimaran, agremente pour les besoins de la cause d'un toit et de murs faits de tole et de planches clouees.

La felure a la base de la colonne de barre, que Marc surveillait depuis un long moment, s'avere inoffensive: apres le demontage integral de la colonne en question, il constate, avec Dominique, que les soudures sont excellentes. Tout peut donc etre remonte... Par contre, la reparation consistant a renforcer la base du verin (soit le bras qui articule la barre) de l'autopilote tourne au vinaigre: Marc casse une premiere, puis une seconde meche, et enfin un taraud en filetant le trou destine a recueillir un ecrou king size. Je suis ravie d'avoir enrichi mon vocabulaire de bricolage, mais quelque peu decouragee par la tournure que prennent les evenements: tant que le probleme du taraud coince n'est pas regle, nous ne pouvons pas naviguer. La cabine babord est sans dessus dessous (l'acces a l'autopilote suppose le demontage de toutes les parois qui constituent le "mur" de la chambre), le carre du bateau (soit notre piece a vivre) est parseme d'outils, le temps passe constamment de la pluie battante au beau, et il n'y a pas grand chose a voir a terre a proximite. Demain dimanche, Marc entamera sa troisieme journee consecutive passee entierement couche par terre, la tete dans le compartiment moteur. Quant a moi, si cela dure, j'emmenerai les enfants prendre le bus jusqu'a Hillsborough, histoire de se distraire un peu...

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mercredi 4 janvier 2012

Sainte Lucie, les Deux Pitons, 25 decembre - 3 janvier

Nous quittons ensemble Marigot Bay et naviguons de concert jusqu’à la baie de Soufrière, au pied des deux imposants Pitons de Sainte Lucie. La faute à la testostérone sans doute, mais la balade se transforme tout de suite en course de vitesse et (tu m’excuseras, Laurent, mais la loyauté conjugale m’oblige à le préciser) Panta Rhei, les voiles en ciseaux selon une technique désormais parfaitement maîtrisée par le capitaine, arrive en tête. Marc jubile, bien entendu.

Les dix jours qui suivirent furent exquis. A l’exception de quelques allers-retours dans la ville de Soufrière, et des deux excursions menées jusqu’au volcan et aux “waterfalls” (les guillements sont volontairement mis), nous avons passé notre temps surtout à bord de Never Mind (ou de son annexe, qui décoiffe), recevant les visites quotidiennes de Sunshine le bien-nommé. Rencontré lorsqu’il a harponné notre bateau à l’arrivée à Marigot pour nous vendre un emplacement pour la visite que l’on ne manquerait pas de faire dans la baie des Deux Pitons, il est devenu un charmant compagnon et guide sur place (et maintenant heureux propriétaire d’une magnifique paire de lunettes de soleil, d’une cape de pluie rose bonbon, d’une lampe frontale, et d’une centainre de kilos de vivres, courtesy of Never Mind).

Nous avons nagé, plongé, joué (encore de nouveaux adeptes du Tuinwoman, dont les parties ont compté beaucoup de Michael Jackson, quelques Ghandi, deux Rantanplan et un Mick Jagger devenu pour toujours Mite Jogging), admiré les arcs-en-ciel, discuté, dansé, ri, cuisiné, récupéré in extremis Panta Rhei dont la bouée avait lâché (gloups – évidemment, elle tenait au fond de l’eau avec une ancre…de dinghy - "Sorry Sir, been working here twenty years, never happened before, Sir"), chaque journée finissant avec le plaisir anticipé du lendemain.  

Merci à Laurent qui, avec un enthousiasme contagieux, n’a pas cessé de vouloir partager son plaisir en nous faisant essayer son impressionante panoplie de “toys” (sic) (sea-doo, doughnut, delfinia et j’en passe), en nous emmenant faire de sublimes plongées au pied des Pitons ou en nous livrant avec malice les mille et un trucs et astuces de ses incomparables checklists – et qui a même accepté sans bouder de nous accompagner en excursion, se contentant de manifester sa liberté de dire non lorsque nous nous sommes retrouvés au bord des bains de boue volcanique et odorante.

Merci à Sophie qui, toujours attentive aux autres, armée de positivité et de bienveillance, voit parfaitement juste et, sans en faire des tonnes, souligne le meilleur chez chacun - et qui nous a offert un mémorable fou-rire avec une imitation de Donald Duck valant tout l’or tout monde… Je conserve de cette belle rencontre l’euphorie d’une amitié naissante (scellée pour de bon dans les peignoirs éponge du magnifique Rainforest Spa de l’hotel Jalousie)… et une redoutable combinaison-dos nu noire aux pouvoirs magiques dont je ne doute pas un instant.

Merci à Noémie, qui, généreuse d’elle-même, a eu des gestes si gentils à l’égard des garçons, les prenant volontiers sous son aile de grande soeur, sur l’eau ou à bord, pour le plus grand bonheur des intéressés – et avec qui nous avons passé un délicieux après-midi à cuisiner le dîner du Nouvel An.

Merci à Gaspard, futur batteur et leader des Mixed Veggies (Marc reste disponible quand tu veux pour te servir de grosse caisse), qui nous a invités spontanément à partager son gâteau d’anniversaire et ne s’est pas départi, malgré la douleur lancinante d’une otite surinfectée, de son sourire et son humour ravageurs. 

Merci à Franck qui s’est montré toujours disponible et aidant, et n’a pas hésité, usant de son sens du sacrifice, à rompre la sobriété monacale du quotidien chez Drion en acceptant de partager avec nous un petit coup de rouge ici et là.

Lundi 2 janvier, après un dernier déjeuner ensemble, ils repartent vers Rodney Bay où ils laisseront leur bateau pour rentrer à Bruxelles. Leur bouée reste vide et il tombe une pluie battante, c’est un spectacle bien triste. Aussi, nous décidons de changer de mouillage et allons nous ancrer devant Soufrière, où nous faisons un brin de promenade avant de passer à bord une nuit de sommeil en dentelle, tant le vent souffle et les alarmes (vent, profondeur) crient.

A l’heure où j’écris ces lignes, ils sont fraîchement partis et l’émotion de les avoir quittés est encore vive. Mais il est question de nous retrouver par ici dans les mois qui viennent…


click here to view photo album - photos subaquatiques: (c) Drion Intl, Inc.



Sainte Lucie, Marigot Bay, 19-25 decembre

Le vent souffle fort à l’extérieur mais nous sommes confortablement accrochés à une bouée, à la lisière de la mangrove, à l’intérieur de la baie connue pour être l’un des meilleurs “trous à cyclone” des Caraïbes: c’est dire si nous sommes protégés…

Le temps est globalement…humide, les grains ne faisant que peu de place aux éclaircies. Nous profitons un peu de la petite plage, partons en bus visiter Castries, la capitale - où nous quittons Ian, mettant un terme au chemin que nous avons parcouru ensemble depuis notre rencontre à Gibraltar à la mi-octobre- et nous lançons dans les préparatifs de saison; à peu près rien ici n’évoque Noël comme nous le connaissons, mais pas question de ne pas y mettre les formes! Aussi, nous fabriquons un sapin en carton (avec les boules, s’il vous plaît) et installons joyeusement les décorations ramenées de Bruxelles: guirlande lumineuse dans le cockpit, étoile géante en papier, petits oiseaux enneigés et autres guirlandes dorées d’un kitsch qui me ravit.

Le 24, en fin d’après-midi, la famille Drion, accompagnée de Franck-le-skipper, et tout juste arrivée de Bruxelles, nous rejoint à Marigot à bord de leur belle* Never Mind. Enchantés de les voir arriver, et déterminés à profiter de leur présence dans le coin, nous ne nous doutions cependant pas que, passé le dîner de Noël tous ensemble chez eux, nous ne nous parviendrions pas à nous quitter pendant toute la durée de leur séjour…

* ce n’est pas parce que c’est un catamaran, ni parce qu’il est imposant, que l’on doit se priver de lui attribuer le genre féminin…

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Martinique 16-19 decembre

16 décembre. Après une halte parisienne de 48 heures avec Poupik, Mami et Nonna (ascension de la Tour Eiffel, promenade en bateau-mouche, Cité des Sciences et visite de la famille Windey-Custer, conformément au rendez-vous pris à Majorque au mois d’août…) et un vol transatlantique de 9 heures, Luca, Vadim et moi atterrissons à Fort-de-France. Les DOM-TOM, soit un morceau de France au bout du monde, où il fait chaud, humide, et où il est cinq heures plus tôt qu’à Paris.

Et puis… les retrouvailles, enfin!! Marc me parait plus beau, bronzé et heureux que jamais. Il nous pilote, comme s’il était ici chez lui, jusqu’à la marina du Marin où Panta Rhei nous attend, magnifiquement nettoyée, rangée, apprêtée pour l’occasion… Marc et moi dînons en tête-à-tête dans le resto de Mango Bay, à échanger nos impressions sur les cinq semaines écoulées en sirotant du rhum punch rose fluo, tandis que les enfants gisent, effrondés de fatigue, sur la banquette…

En guise d’acclimatation, nous passons deux jours sur place: nous redécouvrons rapidement le plaisir de nager dans la mer, de circuler en clapettes, de prendre le temps de flâner… et n’échappons pas au boudin créole, qui se déguste selon une technique très précise consistant à percer la peau d’un bon coup de dent puis sucer le contenu brunâtre et semi-liquide. Mouais. Les enfants en redemandent!

Dimanche 18, nous nous déplaçons jusqu’à la baie qui fait face au village de Sainte-Anne, juste à côté du Marin, où Marc a convenu de récupérer demain ce bon vieux Ian qui nous accompagnera jusqu’à Sainte-Lucie. Le village est minuscule mais charmant, une fête s’y prépare et nous dégustons le cocktail local (encore!) les pieds dans l’eau pendant que Luca et Vadim se font des copains sur la plage. A real taste of the Carribean…

Le lendemain nous passons à la mairie déposer les livres d’école dont nous n’avons plus usage (dernière étape francophone du voyage avant longtemps, il faut en profiter) puis embarquons Ian pour traverser vers Sainte Lucie. La navigation, d’une trentaine de milles, est tranquille et l’arrivée dans la baie de Marigot se fait, selon les usages, sous escorte de jolis bateaux en bois (la plupart aux couleurs rasta), qui tentent tous de nous vendre quelque chose: fruits, poisson, emplacement à une bouée… et même une demande en mariage!





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